Journée d'étude organisée par l' Association Klinikê
Samedi 9 Décembre 2006 de 9h30 à 17h00
Accueillir la psychose en institution : une éthique de la subjectivation.
Sur l’institution
et la psychose, il a été écrit et débattu de nombreuses
fois. Y revenir une fois de plus traduit ce qu’il en est de ce lien si
particulier qu’amène la psychose. L’institution quant à
elle fonctionne comme le psychisme : Elle a ses mythes fondateurs et sa fantasmatique.
Dans l’interstice
de cette rencontre : Psychose et institution, peut naître une éthique
de la subjectivation, à condition que la psychanalyse ne demeure pas
qu’une affaire privée, et que des lieux se destinent à penser
le sujet de l’inconscient et les registres du réel, du symbolique
et de l’imaginaire.
Cette journée propose de continuer à penser à plusieurs
autour des grandes questions que soulèvent la psychose et l’institution
aujourd’hui.
Quelles
stratégies, au sens du transfert, des institutions tentent elles de déployer
pour accueillir la psychose ?
Quelles manœuvres inédites mettent elles en place face aux orientations
politiques dans lesquelles elles sont prises?
L’association klinike vous invite à une journée d’étude avec les participations de Guy Rousseau et Françoise Raux-Filio, psychanalystes, comme animateurs-discutants.
9h30 : Accueil
10h00 : Xavier Moya Plana / Malaise et créativité : « A la recherche d’un malaise suffisamment bon ».La rencontre entre le monde maternel tel qu’il se présente chez les enfants accueillis, souffrant de troubles graves de la personnalité, et l’équipe soignante de l’hôpital de jour, génère du MALAISE :
L’accueillir et ne pas l’évacuer nous amène à penser ce monde maternel comme pouvant devenir symbolisable, déployable dans un espace d’articulation, de création et d’ajustement dans le but de le transformer en « malaise suffisamment bon »…tenter de transformer en aire de jeux le pire des déserts, comme disait Winnicott.
11h15 : Centre de Guénouvry - Interventions de G. Courant et J-E Batardière / Institution et narration "un lieu pour dire", une éthique de la subjectivation.
Parler d’une éthique de la subjectivation, c’est d’abord mettre en œuvre les conditions d’accueil de l’enfant dans une dynamique institutionnelle, accueil entendu, en premier, comme position de l ‘équipe soignante, mise de fond nécessaire, avant que l’enfant n’accède à quelque chose de personnel lui permettant une structuration psychique.
L’institution, par un travail sur les oppositions différentielles, l’articulation du psychique et du social, de l’individu et du collectif, devient un lieu d’échanges où les évènements qui surgissent « se symbolisent » dans une élaboration narrative constante.
En cette époque d’individualisation massive, permettre à chacun de prendre sa propre place dans un ensemble, mettre en jeu une dialectique entre soi et les autres (altérité, étrangeté), entre le style et le statut des différentes personnes, organiser l’institution en un « espace-entre-les-hommes » (H.Arendt), sont une préoccupation qui trace un chemin possible vers l’humanisation.12h30 Fin de la matinée.
14h00 Marie Libeau-Manceau / Le packing, la méthode d’observation de bébé selon Esther Bick et le travail de liens entre institutions : une texture psychique à plusieurs voix.
La parole naît enracinée dans le corps. L’observation du bébé selon la méthode d’Esther Bick offre une expérience des vécus archaïques de portage tant physique que psychique.
Au fur et à mesure des rencontres avec des enfants avec autisme, le danger de clivage entre les différentes approches de prise en charge thérapeutique est apparu de plus en plus criant : d’un côté, les rééducations orthophoniques, éducatives, psychomotrices ; de l’autre, une approche clinique autour du langage déracinée du corps.
La dimension psychique du corps peut se trouver évacuée et avec elle, le processus autistique de démantèlement , de clivage entre le corps psychique et le « corps-viande », renforcé.
La rencontre avec certains enfants nous a amenés à créer avec eux une contenance psychique étayée sur le corps. L’enveloppement humide accompagné d’une élaboration des vécus contre-transférentiels est devenu un objet d’arrière plan essentiel.
Conjointement, nous cherchons activement les sens cachés de certaines postures, de certaines kinésis répétitives, de singuliers langages toniques ou de certains maniérismes gestuels. Nous appuyant sur les travaux de Geneviève Haag, nous tentons une remise en circulation émotionnelle de ce qui semble insensé.
A la lumière de la rencontre de plusieurs enfants dont Aurore (17 ans) adolescente post-autiste à dominante adhésive, Pablo (10 ans) enfant psychotique à dominante projective et Bill (6 ans) enfant autiste, nous témoignerons de ce que le packing et le travail institutionnel nous ont appris.
La transformation des angoisses archaïques et la construction des enveloppes psychiques ne prennent racines que si l’enfant bénéficie d’une structuration spatio-temporelle suffisamment conséquente.
Peut-être aurons-nous le temps d’échanger sur l’absurdité du clivage entre l’éducatif et le thérapeutique.
Toutes démarches qui aident l’enfant à ne pas tournoyer dans le vide, qui l’aident à ne pas se perdre dans une autosensualité sans fin luttent contre le processus autistique.
En développant la complémentarité d’approches très différentes, nous rallierons peut-être nos forces vives en une « présence bien vivante ».(Anne Alvarez). Comment penser l’articulation entre les méthodes éducatives, cognitivo-comportementales et les approches thérapeutiques psychodynamiques ?
15h15 Clinique de La Borde - Intervention de Michel Lecarpentier / Psychoses, club thérapeutique, processus institutionnel et Transfert.
L'accueil et le traitement des personnes psychotiques nécessite un abord multiréférentiel: biologique, pharmacologique, sociothérapique, familial et psychothérapique.
Pour avoir accès à la pathologie vraie de chaque malade, il faut une certaine asepsie qui traite la composante réactionnelle, les effets pathoplastiques dus à l'organisation du dispositif de soin, lui-même et Tosquelles, Torrubia, Oury aujourd'hui, insistent sur la nécessité de proposer une double articulation. Il faut pouvoir soigner le lieu de soin lui-même, l'établissement, toujours menacé de se figer dans les protocoles et les effets délétères des hiérarchies ordinaires indexées à la prévalence des statuts. Ces exigences non traitées infléchissent le style de présence et chacun se trouve aliéné dans la définition restreinte de son rôle propre. Le Club thérapeutique, qui accueille et rassemble les présents quel que soit leur statut, ouvre à une autre logique, au plus près de ce qui donne du sens dans l’existence de chacun, lui permettant un investissement psychique plus diversifié et l’exercice de ses compétences sur un mode plus personnalisé, rendant possible d’articuler statut, rôle et fonction dans le champ ouvert des rencontres. La logique du Club obéit à une loi d'échange qui favorise le processus d'institutionnalisation (Hélaine Chaigneau), donne accès à une possibilité d'historicisation et d'inscription dans une structure narrative où peuvent se produire des constructions psychiques grâce à des émergences transférentielles, identificatoires, des acting-out, etc. L'accueil du singulier dans les modalités d'être de chacun met aussi en fonction son potentiel soignant et lui permet d'accéder à une disposition personnelle active en prise sur une possibilité de structuration fantasmatique plus facilement mise en jeu dans ce champ collectif lui-même en construction.
C’est sur ce fond et cette possibilité d’investissements multiréférentiels qu’une approche psychothérapique peut sans risques excessifs être entreprise.
16h30 : Clôture de la journée.
Association Klinikê, Faculté des Sciences Humaines, rue du Tertre, 44392 Nantes Cedex 03
Infos : 02-40-79-56-06 ou 02-40-79-40-26.